Les rentrées des classes

« Maman, à chaque veille de rentrée c’est la même chose. J’ai du mal à m’endormir. Et si je n’y arrivais pas, et si je rate des cours, et s’ils ne m’aiment pas ?
Maman, j’ai les chocottes.

Comme tous les ans, j’ai préparé mon sac pour demain. J’ai déposé mes vêtements à côté du lit. Même la culotte et les chaussettes pour ne pas ouvrir frénétiquement chaque placard à cause du stress alors que je sais parfaitement où ils se situent.
J’ai fait ma trousse bien proprement en y mettant beaucoup de feutres de couleurs. J’adore avoir plein de choix et les prêter à mes copains.
Je crois bien que je suis prête mais quand même ça fait peur.
Peut-être que le prof’ ne sera pas sympa. Ou pire, il va me détester et me réprimander !
Et si je me retrouvais toute seule à l’heure du repas ? Si personne ne veut s’assoir avec moi ? Si je ne comprends rien ?
Maman, tu es sûre que ça va bien se passer ? »

Les veilles de rentrée se déroulent toujours de la même façon.

Demain, c’est ma rentrée des classes. J’entame une formation de 8 mois pour devenir plombier-chauffagiste. Franchement, je n’y connais rien. Pas encore.

différentes-pinces

J’ai réalisé un petit mémo !

J’ai fait des petites fiches de maths (niveau 5ème) pour me rappeler apprendre les conversions et les mises à l’échelle. Ça fait longtemps que je n’ai pas fait de mathématiques. Longtemps. Je n’étais pas très fortiche. En vrai, j’étais nulle à chier. Encore aujourd’hui, je me demande comment j’ai réussi à faire des études supérieures en comptant si mal. Je vais me rattraper.

tableau-conversion

DIY : un tableau de conversion format pocket plastifié.

J’ai acheté deux pantalons, une salopette et des chaussures de sécurité. C’était bien compliqué. À croire que le marché de la femme dans le BTP n’est pas très développé. Ah bon ? En plus, il semblerait que le 36 fillette n’existe pas à part sur Amazon. J’ai surfé et me suis fait livrer.

Ma réelle crainte se situe deux têtes plus bas, à hauteur du ventre environ.

Seule

Ma réelle crainte est de ne pas être assez disponible pour mes 4 enfants, de passer mon temps à jongler entre l’école, la crèche, le centre social, les courses, les rendez-vous chez le doc’, les activités extrascolaires et tous les à-côtés. En fait, je sais très bien que c’est comme ça que ça va se passer. J’espère que mes petits ne se sentiront pas lésés et que j’aurai toujours l’énergie de leur apporter l’attention dont ils ont chacun besoin.
Du dimanche soir au jeudi soir, je suis seule. Pas de mari, pas de mamie, pas de papi, pas de répit.
Je vais commencer à 7H30, comme sur les chantiers. C’est pour nous habituer.
Évidemment, il fallait une solution fixe et fiable pour les débuts de journée. Je fais appelle à une nounou à domicile.* C’est la première fois. Nous avions toujours réussi à nous débrouiller sans jusqu’à maintenant. Elle amènera les enfants à l’école et Doudou à la crèche.
La peur est au niveau des imprévus. Il y en aura. Il y en a tout le temps.
Ça va commencer dès la rentrée scolaire avec le centre aéré qui ne commence que fin septembre les mercredis après-midi. Et avant, je fais comment ?
J’en ai parlé à mes adorables voisines pour m’assurer. Je n’aime pas demander de service. Sûrement la peur que mes copines détournent le regard en voyant s’afficher mon numéro et en se disant « non, pas encore une fois ». Alors, j’évite au maximum. Les urgences seulement. Heureusement, des urgences, il y en a beaucoup moins souvent.

Demain, c’est ma rentrée des classes. Mon cartable est prêt. C’est bientôt l’heure de plonger. Comme dans toutes les bonnes baignades, j’espère ressentir cette douce fatigue toujours agréablement accompagnée d’épanouissement et de liberté.
Je crois que je vais sacrément m’éclater.
S’il vous plaît, dites-moi que tout va bien se passer.

caisse-à-outils

Mon cartable

Ce texte a été rédigé dimanche soir (hier). Je suis donc en ce moment même en pleine découverte de mon atelier et de mes petits grands camarades.
* Pour une garde d’enfants de ce type (dans notre cas, 4 matinées par semaine de 6h45 à 9h00), j’ai découvert que la CAF pouvait octroyer une allocation appelée « Complément libre choix du mode de garde ». Cette allocation est conséquente notamment lorsque la fratrie compte un enfant de moins de 3 ans comme c’est le cas ici. De plus, nous faisons appel à une société de services à la personne. (Parce que trouver une nounou à domicile pour 4 enfants dès 6h45 du matin c’est…très compliqué) Le tarif est déductible à 50% des impôts. Le budget total s’élève à environ 85€ par mois après déduction. Je pensais sincèrement que cela allait être beaucoup plus douloureux pour nos comptes bancaires.
Merci ma France de m’accompagner dans ma démarche de reconversion.
Plus d’information sur le site de la CAF 

Claire, qui espère être bientôt plombière
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SpiderMaman de triplés : allez hop, au boulot!

Le boulot et moi, c’est plus qu’une histoire d’amour. En 2006, avec SpiderPapa, on commence à penser Bébé. Ca fait deux ans qu’on est marié et mon ventre commence à crier famine. Bien sûr, pour beaucoup de femme, c’est une décision de vie. Pour nous, ce sera un parcours long, fatiguant, bercé d’espoir et de larmes. J’ai eu plus jeune, des problèmes de santé et nous savions dès le départ que la conception se ferait difficilement sous la couette. A la fois, il y a de nombreuses choses autres à faire sous la couette !

Premier rendez-vous chez le roi du frottis et verdict : OMPK (pour les novices : Ovaire Micro Poly Kystiques – en bref, pleins de petits kystes sur les ovaires qui empêchent une bonne ovulation). Nous sommes donc envoyés dans les méandres d’un centre spécialisé dans la barbare “Procréation Médicalement Assistée”,  pour débuter le programme gagnant : échographie plusieurs fois par semaine, piqures quotidiennes, déceptions régulières et réflexions connes « tu devrais éviter d’y penser, ça marchera mieux » !

Bien sûr, les médecins sont débordés. Bien sûr, les rendez-vous ne sont pas uniquement avant 9h ou après 18h et bien sûr, les salles d’attentes sont bondées. Les rendez-vous de contrôle ne durent que quelques minutes à chaque fois mais entre les allers-retours, l’attente dans le cabinet, les coups de téléphone au laboratoire…la facture d’heure commence à grimper.

Côté boulot, j’ai pris le parti d’en parler à mon employeur. Bosseuse invétérée, désinscrite depuis longtemps du forfait « 35 heures », j’ai privilégié l’honnêteté. Pas simplement par soucis de l’autre, surtout pour m’assurer une liberté d’esprit. Déjà prendre des traitements pour faire des bébés ce n’est pas marrant mais si en plus, il faut avoir sa montre en permanence, c’est de la torture !

Le lendemain de l’annonce, mon Président me convoque pour un rendez-vous.

« Claire, vous comprenez, je ne peux pas prendre le risque que vous tombiez enceinte maintenant ! » Et voilà un cas d’école pour la HALDE !

Rupture de CDI, indemnisation de départ, bref, je suis virée ! Génial, ma vie est un vrai bonheur : pas de bébé et plus de travail. Heureusement que j’ai SpiderPapa !

Je trouve alors un petit boulot à mi-temps chez des timbrés qui passent leur vie à crier sur leurs employés. Vu que je n’y suis qu’à mi-temps et que je n’ai pas ma langue dans ma poche, pas de soucis, c’en ai même presque comique. En plus, la souplesse d’horaire me permet de continuer les traitements pour la fertilité l’esprit serein.

Comme toute jeune diplômée avertie, je regarde régulièrement les offres d’emploi et là, je tombe sur une annonce intéressante. Ni une, ni deux, j’envoi mon CV. Premier rendez-vous au siège de la société…à 1h20 en voiture !

Ma hantise de la voiture prend le dessus et SpiderPapa, en mari aimant et dévoué décide de m’accompagner. L’entretien se déroule à merveille. On rentre donc tous les deux en roulant à travers des bois, des forêts, un col embrumé, une autoroute, un tunnel embouteillé. Arrivé à la maison, ma décision est claire : « je n’irais jamais travailler là-bas, beaucoup trop loin ! »

Nous voilà en juin 2009, et…je bosse là bas, au-delà des collines, des bois et des forêts ! Toujours pas de bébé mais un travail passionnant, des dirigeants respectueux, une Directrice extraordinaire. Je travail alors 3 jours sur place (quand même 3 heures de train par jour – quand Dame Gréviste ne fait pas des siennes) et deux jours de chez moi. Mon emploi me permet de travailler à distance. Je continu les traitements et un beau matin, après une 2ème FIV, la gynécologue nous annonce : « il y a trois poches ». Comprenez : « des triplés ».

Flippée pour la grossesse –jamais pour le nombre de bébé – à juste titre suite à plusieurs fausses couches, je préfère dès le départ éviter les trajets. J’en parle donc en avant-première à ma chef, ravie et émue pour moi. Très rapidement, je pose l’un des congés maternités les plus longs de France : 46 semaines.

Sur place je pense que personne ne m’imaginait revenir… fréquemment. Trois enfants d’un coup et 3 heures de train par jour c’est comme qui dirait…pas facile. Et pourtant, en septembre 2010, me revoilà, SpiderMaman en action ! Rendez-vous préalable au retour à l’emploi.

Nous convenons avec mon charmant employeur d’un accord. Je travaillerai en indépendante (sur le même poste) 3 jours par semaine dont un jour au siège. Parfait ! En tant que maman de triplés, j’avais également le choix d’imposer un mi-temps, un 4/5 ou même un congé parental à temps plein pendant 6 ans. (trois ans imposés par la loi à l’employeur et 3 ans avec accord de l’employeur). Cette solution est bonne pour tout le monde !

Les petits sont gardés 2 jours par semaine en crèche municipale. (L’un de ces deux jours me permet d’aller sur place) SpiderPapa s’occupe d’eux le jour où ils sont là et où je travaille de la maison. Le reste du temps, nous profitons seuls ou ensemble de nos trois merveilles. En septembre prochain, nous allons demander 4 jours /semaine de garde à la crèche. Ils seront plus grands et je m’en sens plus capable.

Depuis mon retour, mon amour pour mon entreprise ne cesse de grandir. Soucieuse de mes impératifs, flexible, arrangeante…chaque jour je prends conscience de ma chance de travailler dans une société si respectueuse de la personne. Ma réintégration a été idéale, mes responsabilités n’ont pas été revues à la baisse. Pourvu que ça dur !

A l’heure actuelle, je vous écris d’un café, il est 6h40, mon train ne viendra pas alors je profite de ce moment de grâce pour écrire. Évidemment, la reprise du travail ajoute de la fatigue, de l’organisation, du stress. Mais aussi, de la fierté, de l’estime de soi et surtout, une bouffé d’air. (et aussi, un salaire, ce qui n’est pas négligeable pour une famille nombreuse) Quel plaisir d’intervenir en réunion, de papoter à la machine à café, de monter des projets et de … parler une langue d’adulte.

A toutes les SpiderMamans et SpiderPapas qui souhaiteraient reprendre le chemin du travail, cartable sur le dos : c’est possible, pas facile, mais possible.

maman travaille famille nombreuse

Au café, en attendant le train! (prise par un mauvais photographe)

Le SPIDERPLAN des SPIDERPARENT

– Pour des triplés, le congé maternité est de 46 semaines (24 avant la naissance et 22 après)

– En tant que SpiderMaman de triplés, nous avons le droit à un congé parental de 6 ans. 3 ans que l’employeur est obligé d’accorder et 3 ans où il a un mot sur la décision. L’employeur doit être informé de la reconduction tous les ans. (Envoi d’une lettre avec AR un mois avant l’échéance)

– dès le début de la grossesse, contactez la PMI (Protection Maternelle et Infantile) de votre quartier. En général, cette institution a des contacts avec les crèches et peut vous rendre prioritaire. (en plus de tout le reste : pesé à domicile, soutient, assistante sociale…) N’hésitez pas non plus à aller voir un adjoint au maire pour soutenir votre cause. (et pleurer un peu.)

– Pensez rapidement (avant la naissance des petits) à un mode de garde si vous souhaitez reprendre le travail. Des nounous pour des jumeaux et triplés, ce n’est pas évident à trouver. Mieux vaut prendre de l’avance.

– Calculer le coup de garde (en fonction de votre quotient familiale établi par la CAF. Attention, la CAF prend en compte l’avis d’imposition de 2 ans avant la date où les petits seront gardés !)

– Parlez de votre retour à votre employeur le plus tôt possible (légalement 1 mois avant la fin du congé maternité si l’on souhaite un congé parental d’éducation ou un aménagement du temps de travail) afin de trouver les meilleures solutions.

– Travaillez pour des personnes respectueuses. Dans l’idéal !

– Pensez à la reprise du travail ou l’aménagement du temps de travail en couple (ex. deux 4/5), cela ouvre les possibilités.

– N’hésitez pas à saisir la HALDE en cas d’employeur peu scrupuleux.

– Pourquoi pas une activité d’indépendant? Âmes créatives, le nouveau statut d’auto-entrepreneur permet de créer et de gérer une activité indépendante très facilement. (et avec peu de charges!)

– N’ayez pas peur. Chaque décision qui est la vôtre est la bonne. Avoir des enfants ne veut pas dire oublier sa vie professionnelle. Simplement l’aménager. Et tant pis pour ceux qui diront le contraire. Des parents épanouis font des enfants épanouis. Comme on en a beaucoup (d’enfants) on se doit d’être très épanouis !
Quelques liens utiles:

. liste des PMI (Protection Maternelle et Infantile) par département

. La HALDE: Haute Autorité de Lutte contre les Discrimations et pour l’Egalité

. Auto-entrepreneur: les démarches

. CAF: toutes les infos officielles pour “quand vous attendez un/des enfants”

 

Claire Barer, maman de triplés 
Le blog de triplés- ” La vie des triplés “: trucs, astuces et galères de parents de jumeaux et plus et de familles nombreuses.