Les vacances de la honte

Cette année comme depuis 4 années consécutives (le “4 à la suite” pour les fans du chevelu fou de France 3) , nous avons mis le minimum dans nos bagages pour notre long périple. À six, le minimum correspond à un gros coffre, un tout petit coffre et un bout de coffre de toit. Tout de même.
1h30, c’est la courte distance qui nous sépare de notre ville de Lyon bien aimée.
1h30, et nous sommes au bout du monde. Il y a de la nature jusqu’à l’horizon, des vallées envahies d’herbe bien grasse, de drôles d’insectes et même des vaches. De vraies vaches à la robe beige avec les mouches autour des yeux.

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la “Charolaise”

Pour des rats des villes comme nous, cette maison est un havre de paix que nous aimons animer à coup de rires et de cris émerveillés et non limités par nos voisins.

Comme depuis 4 ans, nous n’avons réussi à obtenir plus de 2 semaines de vacances en commun avec mon mari et les enfants. La première année, je venais d’être embauchée. La seconde, c’est son activité d’indépendant qui réduisait les jours de congé. La suivante, mon licenciement s’annonçait et le budget “hobbies/vacances” se limité. Enfin, pour 2014 deux événements s’entrechoquent pour réduire notre calendrier commun : son nouveau travail et mon entrée en formation dans… 2 jours. Purée 2 jours !

Les vacances des enfants… c’est aussi celles des parents ?

Il se trouve que ces deux semaines précieuses à 6 sont aussi celles où je peux retrouver les yeux de mon mari plus longtemps qu’un café ou qu’un couché à moitié épuisé.
C’est aussi le moment de voir des amis; le peu de distance avec Lyon les invitant facilement à venir pour la nuit avec conjoint et enfants. Et la famille. Chaque année, ma mère nous rejoint une semaine et mon beau-père débarque de l’étranger pour une semaine.
Au final, on assiste à un joyeux défilé, loin des horaires stricts de la maison et de l’année faste que nous venons tous de passée et à laquelle nous nous préparons.

Mais comment ? Comment faire de ces deux semaines un moment serein pour tous ?

C’est là que la honte m’a envahie.

Tout est parti d’une photo.
Le plus grand réseau de France a dû oublier cette grande bâtisse au milieu des champs. J’ai eu beaucoup de difficulté à capter et à me connecter à internet. Ne pas avoir de réseau, c’est peut-être ça les vacances pour un blogueur ? Ou la punition pour passer son année la tête collée à l’ordi, ou à la tablette, ou au portable. Au choix.
J’ai eu à quelques moments des soubresauts de “magique 3G”  qui m’ont permis de poster deux/trois conneries sur Facebook et de parler avec une amie.
Je dis souvent “copine” plutôt qu'”amie”. L'”amie” est quelqu’un de particulier dans mon coeur. Je ne sais pas vraiment par quel procédé on bascule pour moi de “copine” à “amie” mais là, c’est avec une amie que j’échangeais. Pour sûr.
J’en ai profité pour lui envoyer une photo de la scène à mes côtés.

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La photo du “délit”

La question est tombée : “c’est une fille au pair à côté des enfants ?
J’ai répondu un simple “oui“. Un “oui” pas si simple que ça.

Se faire aider pendant les vacances, c’est la honte ?

Il n’y avait aucun jugement dans ses mots, j’en suis sûre. Elle n’est pas comme ça. C’est moi qui me suis fourvoyée dans le rôle de l’accusé. Mon tempérament extrêmement sensible à la culpabilité a sournoisement transformé le “c’est une fille au pair” en un truc du genre : “t’abuses, pour deux semaines de vacances, tu pourrais quand même t’occuper de tes gosses”. Ou bien : “tu as fait 4 gosses, tu assumes“. Je ne sais pas pourquoi tout ça m’a autant pesé, mais c’est ce que j’ai ressenti en avouant “ma faute”.

Peut-être que c’est ça déculpabiliser ?

C’est vrai, pendant les vacances, je rêve de dormir jusqu’à 10h, d’aller faire la sieste à 16h30 alors que c’est l’heure de préparer le goûter pour les 4 lutins affamés, de zapper exceptionnellement l’histoire du soir (parce qu’on a lu 4 fois Robin des bois acheté à la brocante du coin) pour boire un verre (ou deux) avec les amis.
Une fille au pair en vacances, ça m’offre ça. L’occasion d’être là avec un peu moins d’attention que d’habitude.
Depuis l’arrivée de nos triplés en 2009 puis du dernier en 2013, nous sommes en permanence dans l’organisation, la gestion du temps, de l’espace…des cris, des “c’est à moi“. On se dit souvent qu’on aimerait un peu plus de bras même si ce défi nous offre de nombreuses joies quotidiennes. C’est une course de fond, ça demande de l’endurance.
J’ai la faiblesse de dire que je n’en suis pas capable toute l’année. Mes vacances, c’est le moment du relâchement. Celui où je n’ai plus envie d’être dans l’anticipation tout le temps. Ne plus penser dès 10h30 à ce qu’il faudra préparer à manger ou s’il est trop tard pour faire une balade avant la sieste. J’ai envie de me reposer un peu sur quelqu’un. Pas beaucoup, juste un peu. Comme si j’avais une ado responsable en aîné qui aimerait s’occuper de ses frères et sœurs pendant que je bouquine un peu sur la chaise d’à côté.
Comme j’ai l’impression d’être égoïste en écrivant ça et pourtant j’ai aussi l’impression que c’est légitime de vouloir souffler.
En fait, je sais ce qui nous manque vraiment dans la vie avec mon mari. Une grand-mère dispo à côté de la maison pour nous permettre de souffler ponctuellement dans l’année.
Vous en avez une à me prêter ? Promis, après j’arrête les filles au pair. Ou pas.

Qu’est-ce qu’un jeune au pair ?

En réalité, le jeune au pair n’est pas vraiment une grande sœur ou un grand frère par procuration.
Usuellement, ce terme bien précis est utilisé pour définir un jeune étranger célibataire et sans enfant qui passe quelque temps dans une famille d’accueil pour découvrir la culture et la langue. Il est nourri, logé et perçoit une petite rémunération qui correspond à de l’argent de poche.
Wikipédia précise : Le terme « pair » est issu du latin par, paris, qui signifie « égal ». L’expression trouve son origine dans l’idée de parité économique entre les services échangés, par exemple un travail fourni en échange du logement et de la nourriture.
Le concept de “au pair” comprend également un apprentissage linguistique.
C’est un système d’échange de service.

Chez nous, elle (nous n’avons eu que des filles pour le moment) apprend la vie avec des triplés et une fratrie nombreuse. Une nouvelle langue en quelque sorte.
Elle est très rarement seule, car nous sommes très souvent à ses côtés. Il n’est pas question d’abandonner les enfants, mais plutôt d’avoir quelqu’un qui vient en appui dans le quotidien.

Quelques petits conseils pour que les vacances avec un jeune au pair se passent bien :
– Briefer le rôle de chacun dès le départ, les règles de vie (ce n’est pas si évident pour quelqu’un de s’occuper un peu des enfants quand les parents sont à côté, surtout une mère militaire comme …)
– Définir la rémunération à l’avance (je n’ai aucune notion des prix, mais notre part, elle est rémunérée 200€ la semaine)
– Faire participer le jeune à la vie de la famille (repas ensemble, sorties…)
– Lui laisser du temps libre. Pas question de la solliciter à longueur de journée.
– Lui offrir un espace perso. (dormir avec 4 enfants, c’est pas si cool)
Le plus :
Choisir quelqu’un que l’on connaît et qui connaît nos habitudes pour éviter l’effet “intrus”.
Nous avions choisi la petite sœur (17 ans) d’un ami qui en a profité pour venir nous voir quelques jours en la déposant.

le-cirque-du-soleil

On a tout de même eu le temps de s’entraîner pour le Cirque du Soleil !

Claire, maman coupable qui s’est reposée avec ses 4 enfants, son mari, sa famille, ses amis 2 semaines dans l’année. Et sa fille au pair.
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